Tiré du chapitre 5.2 du livre « Vivre jeune 4 : ne soyez pas esclave de votre génétique ». Éric Simard, 245 pages, 2020.

Il s’agit ici du titre d’un livre. Le récit passionnant d’un musicien intéressé par le vieillissement, qui deviendra un des plus importants chercheurs dans le domaine de la longévité. Le professeur Valter Longo dirige l’Institut de la longévité de l’université de Californie du Sud à Los Angeles. Il enseigne en gérontologie et en biologie, avec une spécialité pour la compréhension des processus du vieillissement primaire et les effets de l’alimentation sur celui-ci.

Depuis 2014, le professeur Longo dirige aussi le Programme d’oncologie et de longévité à l’Institut Firc d’oncologie moléculaire de Milan. Il s’agit d’un des meilleurs centres de recherches européens sur le cancer. Il est un des rares scientifiques à associer les observations sur les populations centenaires avec la recherche épidémiologique, la recherche fondamentale sur le vieillissement et la recherche clinique.

Le professeur Longo s’est fait connaître par ses travaux sur le jeûne et la restriction calorique. Il a aussi étudié durant trente ans l’alimentation des populations centenaires afin d’en tirer des approches de recherche pouvant optimiser les recommandations alimentaires de longévité. Il cherche, entre autres, à reproduire les effets bénéfiques de la restriction calorique – sans ses inconvénients et ses risques d’application pour la santé. Ses travaux ont permis des avancées importantes sur des applications en prévention et en traitement, dans le domaine du cancer, des maladies cardiovasculaires, de l’Alzheimer et de la sclérose en plaques.

Ses origines italiennes et la science de la longévité.

Au début du livre, le professeur Longo explique que ses parents et ses grands-parents étaient originaires d’une des régions du monde comptant le plus grand nombre de centenaires par habitant : le village de Molochio. Avec 2 centenaires par 1000 habitants, cela représente 3 fois plus de centenaires qu’à Okinawa, l’île japonaise reconnue pour la grande longévité de ses habitants.

Il est arrivé initialement aux États-Unis avec l’idée de jouer de la musique. Toutefois, les différences des habitudes alimentaires, son intérêt pour la biologie et sa curiosité pour la longévité particulière de ses origines lui ont ouvert les portes de la recherche scientifique. Le premier chapitre de son livre raconte comment le musicien est devenu un grand scientifique, en passant par les apprentissages de l’armée américaine.

Son approche diffère profondément des recommandations alimentaires habituelles parce qu’elle est centrée sur la longévité et non pas sur les maladies à combattre, sur les facteurs de risque à réduire ou encore sur la perte de poids. Plus précisément, il s’intéresse à la capacité à rester jeune. Il croit que le vieillissement existe parce que les espèces ont déjà atteint leur objectif (la reproduction), sans avoir à investir massivement dans leur protection pour atteindre une plus grande longévité. Il appelle cela la longévité programmée ou encore « la juventologie » (la science du rester jeune).

La compréhension du vieillissement

Ses travaux de recherche ont démontré que l’apport en protéine et en sucre simple accélère le vieillissement. Ses travaux sur les levures ont permis de grandes avancées pour l’identification des mécanismes cellulaires causant le vieillissement primaire.

Fortement convaincu qu’il est possible de vieillir en santé, même à un âge très avancé, il donne en exemple deux supercentenaires (plus de 110 ans) qu’il a pu lui-même rencontrer. Il raconte sa visite à une femme italienne qui était, à l’époque, la doyenne de l’humanité. Leurs grandes capacités physiques et mentales, pour des personnes de plus de 110 ans, l’ont convaincu qu’il était possible d’identifier des recommandations permettant à plus de personnes de parvenir à un âge avancé.

Pour ce faire, il se base sur ce qu’il a appelé ses cinq piliers :

  • La recherche fondamentale en biogérontologie (pourquoi on vieillit)
  • La recherche épidémiologique (sur les populations)
  • Les essais cliniques (visant à tester une approche chez l’humain dans un environnement contrôlé)
  • L’étude des centenaires
  • La compréhension des systèmes complexes (la mise en relation de l’ensemble des connaissances)

Son objectif : développer une alimentation qui permet de mimer les bénéfices de la restriction calorique (ou du jeûne), pour améliorer nos capacités de réparation et nous permettre de rester jeunes plus longtemps.

Il a ainsi élaboré des recommandations alimentaires ayant pour but de garder les gens en santé, de les préserver des maladies le plus longtemps possible. Il a estimé que les gens pouvaient gagner de 10 à 30 ans. J’avais moi-même estimé, en sous-titre de mon premier livre sorti en 2016 – en même temps que la première version en italien du livre du professeur Longo – que l’on pourrait gagner 20 ans : « Allongez votre vie de 20 ans ».

Le professeur Longo regroupe l’ensemble de ses recommandations alimentaires dans ce qu’il a appelé « Le régime de longévité ».

Le régime de longévité

Voici deux recommandations primordiales que l’on devrait toujours garder en tête lors de nos efforts pour bien manger :

  1. Premièrement, le plus important est d’obtenir tous les éléments nutritifs qui peuvent nous garder en santé et en consommer le plus possible.
  2. Deuxièmement, c’est de les obtenir en consommant le moins de calories possible, donc à partir d’aliments les plus concentrés en éléments nutritifs.

Je vous énoncerai les 9 principales recommandations du professeur Valter Longo concernant le régime de longévité pour vivre en santé plus longtemps. Je commenterai chacune d’elles pour les mettre en contexte et vous permettre de mieux les comprendre afin de les rendre plus facilement applicables.

1. Adopter une alimentation à base de végétaux et de poissons (2 à 3 fois par semaine), jusqu’à 65-70 ans. Intégrer par la suite des aliments d’origine animale (œufs, lait, fromage).

Mes commentaires

Il faut toutefois faire attention, avant 65 ans, à avoir des sources suffisantes de protéines. Le professeur Longo recommande ici une alimentation à base de protéines d’origine végétale (légumineuses, soya, arachides) avant 65 ans et l’intégration de protéines animales (œufs, lait et fromage) après 65 ans de façon à augmenter légèrement (10 %) l’apport en protéines. Cet apport en protéines est essentiel afin de limiter la perte musculaire (avec l’activité physique). Si vous ne mangez pas de légumineuses, essayez de les intégrer à votre régime alimentaire. Outre l’apport en protéines, elles sont reliées à la longévité pour plusieurs peuples dans le monde.

Selon les études récentes, il n’y a pas de risque et beaucoup de bénéfices à consommer des œufs avec modération (un à deux par jour). Personnellement, je recommande de considérer les œufs – même avant 65 ans – entre autres pour leur apport en lutéine, en vitamine B12 et en choline. Rappelez-vous aussi que si vous n’êtes pas capables d’appliquer ces recommandations à la lettre, le faire partiellement est déjà une bonne chose. Le remplacement d’une portion de protéines animales par une portion de protéines végétales devrait déjà être une source de fierté pour beaucoup de gens. Il faut marcher avant de courir.

2. Manger peu de protéines : 40 grammes pour des personnes de 100 livres, 60 grammes pour des personnes de 200 livres. Un repas plus riche en protéines par jour (30 gr ; après l’exercice de préférence) et augmenter de 10 % la quantité après 65 ans.

Mes commentaires

Ici, il faut savoir que le corps provoque en grande partie le vieillissement primaire (la poussée de l’organisme à vieillir) en réponse à sa mesure de notre capacité à nous développer. Notre vitesse de développement, quand nous sommes jeunes, est directement reliée à notre vitesse de vieillissement plus tard dans notre vie. Les méthodes d’évaluation de notre corps, concernant notre capacité à nous développer, sont reliées à l’apport en calories et l’apport en protéines. Par exemple, quand nous sommes jeunes, plus l’apport en calories et en protéines est élevé, plus la vitesse de croissance est grande (et inversement).

Étant donné qu’il s’agit des mêmes mécanismes pour le vieillissement, plus l’apport en calories et en protéines est grand, plus on vieillit rapidement. Il faut donc essayer de maintenir ces apports à l’essentiel pour rester en bonne santé. Les recommandations du professeur Longo se basent sur les données de ses recherches et les données d’observation des populations centenaires.

Par exemple, à Okinawa – cette île du Japon reconnue pour la longévité en santé de sa population –, l’apport journalier en calories était traditionnellement de 1785 calories pour un apport en protéines de 39 grammes. Il s’agissait d’une alimentation plus riche en éléments nutritifs pour la quantité de calories consommée. Ainsi, les habitants d’Okinawa mangent plus en quantité (poids), mais moins de calories. Leur alimentation est plus riche en légumes et contient moins de produits animaux.

3. Couper les mauvais gras et les sucres raffinés pour les remplacer par de bons gras et des sucres complexes de grains entiers.

Mes commentaires

C’est simple : tolérance zéro. Ici, ne vous dites pas que c’est bien d’en manger à l’occasion. Nous ne devrions jamais manger de produits de farine raffinée (pain blanc et pâtes alimentaires) ; toujours les manger de grains entiers (même les craquelins). Il faut viser la « tolérance zéro » pour avoir vraiment un impact significatif sur notre santé. Il s’agit simplement d’une habitude et y prendre goût, le temps de savourer ces aliments.

Pour ce qui est des mauvais gras, il faut arrêter la friture, la restauration rapide, le gras animal, les gras saturés et les charcuteries. Les bons gras sont ceux de l’huile d’olive, les noix, les poissons gras et les avocats.

4. Donnez à votre corps les nutriments nécessaires : une multivitamine de qualité tous les 3 jours (nutriments nécessaires pour vous, d’une entreprise sérieuse).

Mes commentaires

Eh oui, le professeur Longo recommande de prendre un supplément de multivitamine. Pourquoi ? Parce qu’il est primordial, pour vieillir en santé, de s’assurer de ne pas manquer de certaines vitamines et minéraux. Il en profite pour souligner qu’il est important de considérer la qualité des produits, sachant que les produits sur le marché ne sont pas tous équivalents.

Pour ma part, je mentionne régulièrement en conférence que si votre alimentation est suffisamment riche en fruits et légumes, auxquels s’ajoutent les noix, vous devriez considérer seulement les oméga-3 et la vitamine D. Une multivitamine ne peut pas faire de tort, mais elle n’est peut-être pas nécessaire.

Il faut savoir ici que le professeur Longo parle beaucoup dans son livre de réduction de l’apport calorique, de jeûne et de jeûne intermittent. Il est bien sûr encore plus important de considérer un supplément de vitamines et minéraux, si on fait des périodes de restriction calorique, afin de s’assurer de ne pas manquer d’éléments essentiels.

N’hésitez pas à consulter une nutritionniste et à en parler à votre médecin et sachez que ces périodes de restriction calorique ne sont pas recommandées pour tout le monde. Par exemple, la liste n’est pas exhaustive, il est conseillé d’avoir un avis médical si vous avez plus de 70 ans, une maladie chronique, des problèmes de gestion du glucose, des médicaments pour la pression artérielle ou un surpoids important.

Conclusion de cette première partie

Étant donné la grande quantité d’information, nous avons décidé de séparer le tout en deux articles. Dans l’article 2, je passerai en revue les 5 autres recommandations du professeur Longo et continuerai à vous donner mes commentaires sur ses recommandations visant à développer une alimentation axée sur la longévité en santé.

 

 

Autres lectures proposées :

 

 

References:

  • Bergeron et Pouliot, 2011. La carence en vitamine B12 — sous-estimée et sous-diagnostiquée. Le Médecin du Québec, Volume 46, Numéro 2, 2011.
  • International Agency for Research on Cancer. 2015. Volume 114 : Consumption of red meat and processed meat. IARC Working Group. Lyon ; 6–13 September, 2015. IARC Monogr Eval Carcinog Risks Hum (in press). https://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045(15)00444-1/fulltext
  • Kolber et Houle, 2014. Oral vitamin B12 — a cost-effective alternative. Vol 60 : february • février 2014 | Canadian Family Physician • Le Médecin de famille canadien.
  • Kraus et al, 2019. 2 years of calorie restriction and cardiometabolic risk (CALERIE): exploratory outcomes of a multicentre, phase 2, randomised controlled. The Lancet Diabetes & Endocrinology. Volume 7, ISSUE 9, P673-683, September 01, 2019.
  • Meier T. et al. 2019. Cardiovascular mortality attributable to dietary risk factors in 51 countries in the WHO European Region from 1990 to 2016: a systematic analysis of the Global Burden of Disease Study. European Journal of Epidemiology (2019).
  • Moore E, Mander A, Ames D, Carne R, Sanders K, Watters D. 2012. Cognitive impairment and vitamin B12: a review. Int Psychogeriatr. 2012 Apr;24(4):541-56. Review.
  • Valter Longo, 2016 (en français 2018). Le Régime de Longévité. Editions Actes Sud Format : 336 pages.
  • Willcox et al, 2007. Caloric Restriction, the Traditional Okinawan Diet, and Healthy Aging: The Diet of the World’s Longest-Lived People and Its Potential Impact on …. Ann. N.Y. Acad. Sci. 1114: 434–455 (2007).