Tiré du chapitre 5.2 du livre « Vivre jeune 4 : ne soyez pas esclave de votre génétique ». Eric Simard, 245 pages, 2020.

Dans le premier article, je vous ai présenté ce livre passionnant d’un musicien intéressé par la longévité, qui deviendra un des plus importants chercheurs dans le domaine. Le professeur Valter Longo dirige l’Institut de la longévité de l’université de Californie du Sud à Los Angeles. Il enseigne en gérontologie et en biologie, avec une spécialité pour la compréhension des processus du vieillissement primaire et les effets de l’alimentation sur celui-ci.

Le premier article introduit son histoire comme chercheur émérite et présente ses quatre premières recommandations. Voici maintenant ses 5 autres recommandations pour le développement d’une alimentation axée sur la longévité en santé.

5. Mangez ce que mangeaient vos ancêtres.

Mes commentaires

Attention à bien comprendre de quoi il s’agit. Ici, le professeur Longo ne fait pas référence à la « diète paléo », avec laquelle il n’est pas en accord et moi non plus d’ailleurs. En résumé, la diète paléo recommande de manger comme mangeaient les hommes des cavernes, puisque c’est de cette façon que nous avons évolué depuis des milliers d’années. Cela a beaucoup de sens, mais…

Ce n’est pas parce que nous n’avions pas accès aux grains entiers en grande quantité que cela est nécessairement mauvais. Une étude récente, publiée en janvier 2019, rapporte les analyses des données de l’Organisation mondiale de la Santé pour 51 pays au sujet des décès cardiovasculaires attribuables à une alimentation déséquilibrée (par ordre d’importance [Meier T. et al. 2019]). En voici les résultats :

  • pauvre en grains entiers = 429 000 décès ;
  • faible en noix et graines = 341 000 décès ;
  • pauvre en fruits = 262 000 décès ;
  • riche en sodium = 251 000 décès ;
  • pauvre en oméga-3 = 227 000 décès.

Les grains entiers sont extrêmement bénéfiques pour la santé.

Ce à quoi fait référence le professeur Longo est l’accès à certains types d’aliments, en fonction de nos origines, remontant à quelques centaines, voire un millier d’années. Par exemple, pratiquement toutes les personnes d’origine asiatique ne sont pas capables de digérer le lactose à l’âge adulte. C’est dû au fait que leurs ancêtres n’en consommaient tout simplement pas. À l’âge adulte, ils ne produisent plus l’enzyme que l’on nomme β-galactosidase, permettant de digérer le lactose.

Le professeur Longo souligne ainsi le fait que nous devrions essayer de respecter, dans nos choix alimentaires, les principaux aliments qui étaient consommés par nos ancêtres. Pour une personne d’origine italienne, il ne faudrait pas essayer de manger comme un Africain.

6. Les repas :

  • À moins d’un poids et/ou tour de taille normal : prendre 2 repas par jour, dont un repas principal, un petit repas et une collation nutritive.
  • Si poids normal, perte de poids ou perte de masse musculaire : prendre 3 repas par jour + une collation nutritive.

Mes commentaires

Ici, il s’agit d’un des plus importants messages de ce grand spécialiste de la nutrition/longévité et d’un des plus délicats. Le professeur Longo mentionne aussi que, passé 70 ans, tout comme pour l’apport en protéines, il faut faire beaucoup plus attention à ce type de recommandations. Passé cet âge, la capacité d’adaptation diminue. Il est plus difficile de gérer des périodes avec moins de calories.

Retenez que notre fréquence alimentaire et la taille de nos repas – en tenant pour acquis qu’ils sont riches en légumes – devraient servir à surveiller notre tour de taille et à s’adapter en conséquence. Nous mangeons habituellement trop, et ce, trop souvent. La recommandation est donc de deux repas, dont un léger et un normal (pas un buffet) ainsi qu’une collation nutritive telle que des légumes crus avec fruits ou noix. Trois repas si le poids est normal ou en perte de poids.

Il est possible ici de développer un autre réflexe : la satisfaction de ressentir notre faim. Souvent nous n’avons pas réellement faim. Nous mangeons parce qu’il faut manger, parce que c’est l’heure de manger. De plus, nous mangeons des portions que l’on considère adéquates parce que nos parents nous l’ont montrée ainsi ou parce que c’est le restaurant qui le propose.

Nous devrions porter une plus grande attention à manger selon la façon dont nous nous sentons en gardant aussi à l’esprit que les aliments peuvent être une belle récompense ou une source de réconfort.

Il n’existe pas deux personnes semblables et aucune recommandation ne devrait s’appliquer sans tenir compte des réalités de chacun. N’hésitez pas à consulter une nutritionniste.

Il est évident que cette recommandation de 2 repas et une collation n’est pas en phase avec les recommandations véhiculées depuis des décennies : il est soi-disant nécessaire de prendre 3 repas par jour et deux collations. Retenez que pour la majorité des gens, le fait d’avoir faim est bénéfique pour la santé et que nous devrions y porter attention pour nous assurer de le ressentir chaque jour.

Voici à cet égard, une confirmation intéressante de l’importance de cette recommandation, tirée d’une étude publiée en 2019 par un cardiologue, professeur à l’Université Duke aux États-Unis :

« Une restriction calorique modérée (300 calories) chez des gens ayant déjà un poids santé, améliore leurs paramètres physiologiques en lien avec les risques de maladies métaboliques (obésité, diabète de type II et maladies cardiovasculaires). »

Une réduction moyenne d’aussi peu que 300 calories par jour diminue déjà les risques de maladies cardiovasculaires. La croyance populaire veut que si on n’a pas de problème de poids, nous puissions manger ce que l’on désire. C’est en partie vrai, à condition de bien manger, et que cette alimentation soit axée sur un apport riche en nutriments et faible en calories (pas de « fast-food »).

7. Répartissez vos repas sur un maximum de 12 heures.

Mes commentaires

Dans mes explications sur la recommandation précédente, j’ai mentionné deux éléments particulièrement importants :

  • nous mangeons habituellement trop, et ce, trop souvent, et
  • le fait d’avoir faim est bénéfique pour la santé et nous devrions y porter attention pour nous assurer de le ressentir chaque jour.

La recommandation numéro 7 du professeur Longo regroupe ces deux aspects, en lien avec ses résultats de recherche. Au cours des dernières décennies, beaucoup de recommandations alimentaires ont été orientées vers l’équilibre constant de l’apport énergétique. Le fait, entre autres, d’éviter de ne pas manger suffisamment à un repas, pour ne pas compenser et trop manger au repas suivant. Voilà ici un autre exemple mettant trop l’attention sur le négatif : le risque de compenser au repas suivant. Pour ma part, je recommande de mettre l’accent sur le positif : portez attention à votre sentiment de satiété afin de ne pas trop manger et rappelez-vous que le fait d’avoir faim est bénéfique pour la santé.

Ainsi, la période de 12 heures sans manger permet au corps d’entrer dans son cycle d’utilisation de ses réserves, ce qui est très bénéfique pour la santé. Retenez que pour un apport calorique égal, il est bénéfique qu’il soit consommé sur une plus courte période. Cette période pourrait aussi être de 8 ou 10 heures dans la journée.

Ici, la recommandation du professeur Longo est d’un maximum de 12 heures. Cela est facilement réalisable. Même si vous soupez relativement tard, il est possible de déjeuner aussi plus tard : finir de souper à 21 h et déjeuner à 9 h le lendemain matin. Il est à noter que cette recommandation fait largement consensus au sein des chercheurs dans le domaine de la longévité, mais elle n’est pas applicable à certaines personnes qui pourraient ainsi se retrouver avec des niveaux de glycémie trop bas ou des chutes de pression artérielle. Dans certains cas, l’amélioration d’autres conditions de santé serait un préalable à l’application de cette recommandation. Par exemple, l’activité physique, avec perte de poids si applicable, pourrait améliorer suffisamment la gestion du glucose pour permettre, par la suite, de réduire la durée des périodes d’alimentation durant la journée.

8. Pratiquez régulièrement des périodes de diètes à plus faible apport calorique (≈ 800 calories), mais très nutritif, si vous êtes à un poids normal et non affecté par des maladies.

Mes commentaires

Que veut dire le terme « régulièrement » et « très nutritive » ? Le « régulièrement » s’applique en considérant bien sûr que la personne ne court aucun risque à réduire, durant une semaine, son apport calorique de tous les jours. Le professeur Longo recommande de le faire pour les personnes ayant un poids normal, deux fois par année. Il s’agit de réduire l’apport calorique à 800 calories durant 5 à 7 jours.

Le « très nutritive » se rapporte à une alimentation pratiquement végétarienne, très riche en nutriments, comme cette salade de légumineuses contenant des avocats. Vous avez ici vos légumes, un peu de fruits, vos protéines et de bons gras ; tout ceci dans un petit repas très nourrissant sans trop de calories.

Il est complexe de calculer les calories et de faire attention à ce que ces périodes de réduction soient bien équilibrées en éléments nutritifs. Le professeur Longo donne des exemples de repas dans son livre, mais le plus simple est de consulter un(e) nutritionniste.

9. Utiliser les 8 recommandations précédentes pour contrôler votre poids : 34 de taille pour les hommes, 28 pour les femmes. À partir de 40 et 35 respectivement, on double les risques de mortalité prématurée.

Mes commentaires

Bien manger et être bien dans votre peau doit, bien sûr, être la priorité. L’objectif du professeur Longo est d’attirer votre attention sur l’usage de la taille des portions et de la fréquence de l’alimentation pour aider à conserver un poids santé. N’oubliez pas que l’objectif premier de ce chapitre n’était pas le contrôle du poids, mais l’alimentation en lien avec la longévité.

Sachez aussi que pour les personnes au-dessus des valeurs mentionnées, perdre un peu de poids est déjà bénéfique. De plus, en vieillissant, il semble qu’un poids légèrement plus élevé réduise les risques de certains problèmes de santé. Le professeur Longo mentionne que pour les personnes de 70 ans et plus, un indice de masse corporel un peu plus élevé les aiderait à conserver leur masse musculaire.

La recommandation ici est d’utiliser les conseils de saine alimentation pour bien gérer son poids ; mais si vous avez des problèmes de poids, ce n’est pas suffisant. Une approche globale de santé est tout avisée. Cela doit être complémentaire aux autres facteurs d’une saine gestion du poids corporel, comme le fait de faire de l’exercice, de bien dormir, de bien gérer son stress et surtout, d’avoir une bonne façon de voir les choses.

 

 

Autres lectures proposées :

 

 

Références :

  • Bergeron et Pouliot, 2011. La carence en vitamine B12 — sous-estimée et sous-diagnostiquée. Le Médecin du Québec, Volume 46, Numéro 2, 2011.
  • International Agency for Research on Cancer. 2015. Volume 114 : Consumption of red meat and processed meat. IARC Working Group. Lyon ; 6–13 September, 2015. IARC Monogr Eval Carcinog Risks Hum (in press). https://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045(15)00444-1/fulltext
  • Kolber et Houle, 2014. Oral vitamin B12 — a cost-effective alternative. Vol 60 : february • février 2014 | Canadian Family Physician • Le Médecin de famille canadien.
  • Kraus et al, 2 years of calorie restriction and cardiometabolic risk (CALERIE): exploratory outcomes of a multicentre, phase 2, randomised controlled. The Lancet Diabetes & Endocrinology. Volume 7, ISSUE 9, P673-683, September 01, 2019.
  • Meier T. et al. Cardiovascular mortality attributable to dietary risk factors in 51 countries in the WHO European Region from 1990 to 2016: a systematic analysis of the Global Burden of Disease Study. European Journal of Epidemiology (2019).
  • Moore E, Mander A, Ames D, Carne R, Sanders K, Watters D. 2012. Cognitive impairment and vitamin B12: a review. Int Psychogeriatr. 2012 Apr;24(4):541-56. Review.
  • Valter Longo, 2016 (en français 2018). Le Régime de Longévité. Editions Actes Sud Format : 336 pages.
  • Willcox et al., Caloric Restriction, the Traditional Okinawan Diet, and Healthy Aging: The Diet of the World’s Longest-Lived People and Its Potential Impact on …. Ann. N.Y. Acad. Sci. 1114: 434–455 (2007).