Dans les deux premiers articles, je vous ai parlé de la base biologique du jeûne (article 1) et des raisons pour lesquels le jeûne peut être bénéfique pour la santé (article 2). Nous parlerons ici des différents types de jeûnes afin de mieux situer ce que c’est.

D’un point de vue scientifique, nous définissons principalement deux types de jeûne : intermittent et périodique.

Jeûne intermittent et périodique

Le jeûne intermittent est de moins longue durée, mais prévoit généralement une fréquence plus rapprochée. Il peut s’agir par exemple d’un jeûne d’alternance d’une journée (jeûner une journée sur deux) ou à tous les deux jours, ou même, de 18 heures dans une journée, à tous les deux jours ou durant une semaine. Le jeûne périodique dure plusieurs jours (2 à 7 jours ou plus), par exemple toutes les deux semaines ou plus.

La grande différence de ces deux approches sera l’intensité des changements métaboliques provoqués. Le corps s’adapte graduellement au manque d’énergie provenant du glucose et l’intensité des changements sera d’autant plus prononcée que la période de jeûne est longue. Ainsi, le jeûne intermittent provoquera des changements plus fréquents, mais de moins fortes intensités, alors que le jeûne périodique permet des changements plus profonds, mais moins fréquents. Cela dépend aussi bien sûr du niveau d’activité durant le jeûne. Vous vous posez sûrement la question : On peut faire de l’activité physique le ventre vide?

Eh oui! Une étude récente vient démontrer un bénéfice supérieur de l’activité physique réalisée avant le déjeuner chez des hommes obèses ou en surpoids. L’amélioration de l’utilisation des graisses comme source d’énergie est à la base des bénéfices identifiés. De la même façon, l’utilisation des graisses durant un jeûne dépendra de la durée du jeûne et du niveau d’activité de la personne.

Pas pour tout le monde

Il y a tout de même certains risques pour la santé et notez bien, le jeûne n’est pas une approche applicable pour tous. Le jeûne n’est pas applicable entre autres pour les jeunes, pour les gens à faible poids, ceux en dénutrition, ayant un âge très avancé ou ayant un faible système immunitaire. Il est toujours important d’en parler avec votre médecin. Nous reviendrons sur les contre-indications du jeûne dans un prochain article.

On peut alors se demander : est-il préférable d’avoir des impacts plus légers et plus fréquents, ou plus forts, mais moins fréquents ? Les études sur le jeûne suivent un grand nombre de marqueurs biologiques, non seulement en fonction du type de jeûne, mais aussi en fonction de l’objectif poursuivi. Le jeûne pour combattre l’obésité n’a pas les mêmes objectifs et les mêmes considérations que le jeûne pour la longévité chez une personne en pleine santé. La condition de la personne, ses habitudes de vie, ses paramètres physiologiques et ses objectifs sont très importants.

Deux premières recommandations simples :

  1. Si vous désirez essayer de faire du jeûne pour des périodes de plus de 24 heures, il est préférable d’être suivi par votre médecin ou en clinique spécialisée.
  2. Si le jeûne est utilisé dans un contexte de traitement médical (ex. : cancer, obésité, problèmes métaboliques ou arthrite rhumatoïde), il est très important d’avoir le suivi périodique de votre médecin.

Dans la mesure où l’alimentation est saine et équilibrée

Donc si c’est pour aider au contrôle du poids corporel ou encore pour la réduction des risques de maladies (cancer, diabète de type II, maladies inflammatoires, hypertension, dégénérescence nerveuse, syndrome métabolique), le jeûne intermittent de 18 heures par jours pour quelques jours par semaine ou d’une durée de 24 heures, une journée sur deux, peut donner de bons résultats. Je vous rappelle encore que ceci est vrai dans la mesure où il s’agit d’une saine alimentation. Le jeûne ne peut pas pallier une mauvaise alimentation. De plus, une diète trop riche en calories ou trop riche en protéine pourrait annuler les effets du jeûne sur la longévité.

12, 15 ou 18 heures sans manger

Le professeur Valter Longo, qui dirige l’Institut de la longévité de l’université de Californie du Sud à Los Angeles, fait la recommandation de manger sur des périodes de 12 heures et moins dans son récent livre « Le régime de longévité ». Il enseigne en gérontologie et en biologie, avec une spécialité pour la compréhension des processus du vieillissement primaire et les effets de l’alimentation sur celui-ci.

Ainsi, la période de 12 heures sans manger permet au corps d’entrer dans son cycle d’utilisation de ses réserves, ce qui est très bénéfique pour la santé. Retenez que pour un apport calorique égal, il est bénéfique qu’il soit consommé sur une plus courte période de temps. Cette période de temps pourrait aussi être de 6, 8 ou 10 heures dans la journée. Vous comprenez que sans appeler cela du jeûne, de regrouper les repas sur la période la plus courte, est très bénéfique. Un jeûne intermittent de 18 heures représente une prise alimentaire sur une période de 6 heures.

Ici la recommandation du professeur Longo est d’un maximum de 12 heures. Cela est facilement réalisable. Même si vous soupez relativement tard, il est possible de déjeuner aussi plus tard : finir de souper à 21 h et déjeuner à 9 h le lendemain matin. Il est à noter que cette recommandation fait largement consensus au sein des chercheurs dans le domaine de la longévité, mais elle n’est pas applicable à certaines personnes qui pourraient ainsi se retrouver avec des niveaux de glycémie trop bas ou des chutes de pression artérielle. Dans certains cas, l’amélioration d’autres conditions de santé serait un préalable à l’application de cette recommandation. Par exemple, l’activité physique, avec perte de poids si applicable, pourrait améliorer suffisamment la gestion du glucose pour permettre, par la suite, de réduire la durée des périodes d’alimentation durant la journée.

Nous aborderons plus précisément les protocoles de jeûne dans le prochain article.

 

Références :

  • de Cabo et Mattson, 2019. Effects of Intermittent Fasting on Health, Aging, and Disease. New England Journal of Medecin. 381 (26), 2541-2551. 2019 Dec 26.
  • Longo, Valter, 2016 (en français 2018). Le Régime de Longévité. Editions Actes Sud Format : 336 pages.
  • Longo et Mattson, 2015. Fasting: Molecular Mechanisms and Clinical Applications. Cell Metab. Author manuscript; available in PMC 2015 Feb 4. Cell Metab. 2014 Feb 4; 19(2): 181–192.
  • Longo VD, Panda S. Fasting, Circadian Rhythms, and Time-Restricted Feeding in Healthy Lifespan. Cell Metab. 2016;23(6):1048–1059.
  • Mattson, Longo, et Michelle, 2017. Harvie Impact of Intermittent Fasting on Health and Disease Processes. Ageing Res Rev. 2017 October; 39: 46–58.
  • Robert M Edinburgh, Helen E Bradley, Nurul-Fadhilah Abdullah, Scott L Robinson, Oliver J Chrzanowski-Smith, Jean-Philippe Walhin, Sophie Joanisse, Konstantinos N Manolopoulos, Andrew Philp, Aaron Hengist, 2020. Lipid Metabolism Links Nutrient-Exercise Timing to Insulin Sensitivity in Men Classified as Overweight or Obese. The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism, Volume 105, Issue 3, March 2020.